Mandat d'administrateur: limitation de la durée

Dans un premier temps, un copropriétaire m'a fait parvenir, sous condition d'anonymat, une proposition qu'il projette de soumettre à l'administrateur de son bloc et qui tend à limiter la durée de mandat des administrateurs pour une gestion plus efficace, voire moins controversée, de nos biens communs. En bref, il propose que l'administrateur soit rééligible à bulletins secrets par période de dix années pour un maximum de cinq années, consécutives ou non. Son argumentaire reprend, et conteste, les trois objections qui lui ont déjà été opposées: coût de la modification au « Règlement d'Administration et d'utilisation de la copropriété (RAU) », l'élection « démocratique » annuelle de l'administrateur et la possibilité qu'aucun candidat-administrateur ne se manifeste en réunion de bloc.

 

Cette démarche s'inscrit dans une contestation générale, diffuse mais réelle, depuis les deux dernières A.G. contre la personnalisation extrême de la gestion commune de la résidence comme il est clairement apparu lors du débat sur les caméras de surveillance à l'A.G. d'avril dernier ou dans la mise sur pied - et la présentation orientée - du projet Commuté.

 

Voici d'abord la lettre :

Concerne: demande de modification du « Règlement d'Administration et d'Utilisation de la copropriété »

 

Monsieur (l'Administrateur),

 

Nous faisons suite aux deux dernières Assemblée Générale de copropriété qui furent pour le moins houleuses.

 

Notre analyse nous conduit à la conclusion que, si un changement fondamental n'est pas opéré, cette situation nous conduira au mieux à de nouvelles situations de blocages ne permettant pas de gérer notre copropriété selon les intérêts de la majorité et au pire à un clash dont nul ne connaît les conséquences.

 

Notre postulat est que des lutes intestines opposent deux « clans » politiquement opposés, lutes prenant leur source dans le fait qu'un ou plusieurs administrateur(s), certes élus démocratiquement, « imposent » leur pouvoir depuis de nombreuses années. Lorsqu'à l'instar d'autres copropriétaires, nous avons posé la question aux deux assemblées (de la dépendance commune et de bloc) sur la question d'une limitation du nombre des mandats d'administrateur, les personnes interpelées ont répondu en substance ce qui suit :

  • l'administrateur est élu démocratiquement chaque année ;
  • une modification des statuts couterait au moins Frs 15'000.-- ;
  • que se passera-t-il si un administrateur n'était pas identifié ?

Or, les réponses à ces « arguments réflexes » sont simples :

  • il existe moult régimes, politiques ou autres, élus « démocratiquement » à des taux défiants toutes les lois statistiques;
  • le coût d'une modification des statuts ne peut être opposé au principe de sauvegarde des intérêts de la majorité des copropriétaires;
  • la question de l'absence de candidature d'administrateur peut déjà se présenter dans notre mode de fonctionnement à ce jour ; de plus, le climat actuellement délétère ne nourrit-il pas cette absence de vocations ?

Par conséquent, comme le prévoit l'article 50 du « Règlement d'Administration et d'Utilisation de la copropriété » ci après :

 

Nous vous demandons de réquisitionner une modification du règlement susmentionné pour notre prochaine Assemblée de la dépendance commune sur la base de la proposition suivante :

 

Version actuelle

Version soumise au vote

Article 39 - Nomination et révocation

 

Conformément à l'article 36 du présent règlement, l'Assemblée nomme à la majorité simple l'Administrateur pour une période d'une année ; l'Administrateur est rééligible mais pour un maximum de 5 années, qu'elles soient consécutives ou non et ceci par période de 10 ans à compter de la première élection.

 

L'administrateur de bloc est une personne physique ou une personne morale. Il est choisi prioritairement parmi les copropriétaires du bloc concerné, le cas échéant, de la copropriété.

 

L'administrateur de la dépendance commune devra disposer des compétences professionnelles et de l'infrastructure requise pour la gestion de l'ensemble de la Résidence telle que définie à l'article 40.

 

A défaut de nomination par l'Assemblée, chaque copropriétaire peut demander au juge de nommer un Administrateur pour une durée déterminée.

 

L'Administrateur nommé par l'Assemblée des copropriétaires peut être révoquée en tout temps par cette dernière, à la majorité prévue à l'art. 36. Demeurent réservées les dommages-intérêts éventuellement dus à l'Administrateur révoqué, conformément à l'article 712r, alinéa 1, du Code Civil suisse.

 

Si, malgré de justes motifs, l'Assemblée refuse de révoquer l'Administrateur, chaque copropriétaire peut demander au juge, dans les 30 jours, de prononcer sa révocation et d'en désigner un nouveau.

 

L'administrateur nommé par le juge ne peut pas être révoqué sans l'assentiment de celui-ci avant le terme fixé à ses conditions.

 

Article 39 - [Clause transitoire]

 

La nouvelle version de l'art. 39 votée à la double majorité en Assemblée de la dépendance commune du (date), déploie ses effets avec effet immédiat. Lorsqu'un administrateur ne remplit pas ses conditions, une assemblée extraordinaire de bloc est organisée afin d'élire un nouvel administrateur. L'administrateur sortant est révoqué dès l'élection du nouvel administrateur

 

Au final, nous sollicitons pour cet objet important, un vote à bulletin secret afin que chacun se sente totalement libre de s'exprimer sans être victime de jeux d'influence, de dénigrement ou de sarcasme.

 

Nous vous remercions de prendre bonne note de ce qui précède et dans l'attente de vos nouvelles, nous vous prions d'agréer, Monsieur (l'Administrateur), nos sincères salutations.

 

Trois réactions me sont parvenues et que je vous communique pour alimenter le débat:

 

Mme B. Pivot m'écrit:...Oui j'adhère à cette idée. Il me semble que ce point devrait être discuté en vue de la prochaine assemblée générale. Une telle lettre me semble t-il devrait être retravaillée....

 

M. J.J. Turban :...Bien recu votre proposition , pas d'objection pour le projet s'il arrive a atteindre son but. Je serais pour une periode de 3 a 4 ans.maximum ( et pas réeligible ). D'autre part les réunions de blocs ,sont toujours sous l'influence des gérants qui nous écoutent sans donner suite a nos propositions....

 

La réaction d'E. Verkooyen qui est administrateur du Bloc L depuis un peu plus d'une année offre un intérêt particulier. Il y apporte le poids d'une expérience personnelle d'une année d'initiation aux responsabilités et aux problèmes d'un administrateur, mais aussi une vision modérée et concrète, des difficultés qu'il y aurait à modifier par trop les situations existantes, aussi imparfaites qu'elles puissent être:

Cette idée - déjà évoquée lors de l'AG - n'est pas la bonne voie à suivre à mon avis. Si, pour diverses raisons, je n'ai moi-même jamais pensé faire plus de 5-6 ans (voire moins si mes objectifs sont atteints avant), je pense sincèrement qu'une telle période est pour ainsi dire minimale pour

  • prendre pleinement possession du terrain que représente la fonction…
  • pour rentabiliser l'investissement personnel (la compensation financière n'étant pas à la hauteur pour les 2-3 premières années de travail de rattrapage…).

L'idée n'est pas réaliste du tout en l'état;

  • l'auteur semble croire qu'on peut changer d'administrateur chaque année… l'efficacité, le suivi, la stabilité en seraient très lourdement affectés !
  • dans certains blocs, la relève est vraiment difficile à trouver !

Last but not least, c'est une erreur politique classique que de passer d'un extrême à l'autre. Comme si l'on espérait rattraper le temps perdu! Si, dans un bloc, un administrateur travaille bien et bénéficie d'un soutien sans faille de ses administrés, une telle règle rigide serait perçue comme une absurdité. Et aboutirait sans doute à des constellations de façade, comme en Russie avec un Medvedev à la place de Poutine.

 

Ce qu'il faut, c'est que la « société civique » (l'ensemble des copropriétaires) reste éveillée et vigilante, que le « Parlement » (les administrateurs) informe mieux la population qu'il représente et surtout qu'il cesse de laisser des prérogatives capitales (les concierges p.ex.) aux seules mains de notre « Exécutif » (Gérofinance) qui lui forcément ne s'y intéresse guère!

 

Je vous invite à commenter à votre tour cette proposition ou les avis déjà exprimés.